Rue
de Douai, devant le Mansart. Quatre tocards habillés comme des beaufs
somment un mec menotté dans le dos et allongé par terre de se lever, en
lui mettant des chassés dans les côtes. Le redresseur de torts qui
sommeille en moi se réveille : "si vous lui retirez les menottes,
peut-être qu'il y arrivera mieux". L'un d'eux s'approche de moi pour
mieux me faire profiter de son haleine délicate, et articule
péniblement "casse-toi, enculé !". Goûtant peu à l'expression chamarrée
des flics en civil, je rétorque : "t'es qui bolosse ? reste poli". Ce à
quoi l'hurluberlu (maintenant appuyé par ses trois petits copains)
insiste : "dégage, enculé, on t'a pas parlé". Décidément, ces gens là -
quoique payés par la collectivité - ont des manières peu urbaines. Je
m'avance, et profitant de ma tête de plus que mon imbécile
d'interlocuteur, lui dis sur un ton un peu "Rambo" : "fais gaffe comment
tu m'parles wesh, il va falloir que t'assures derrière". Aussitôt me
voilà encerclé par les quatre valeureux défenseurs de l'Ordre
Républicain, auxquels je demande s'ils n'ont pas peut que, seul contre
quatre, je sois trop nombreux. Je ne sais pas s'ils ont compris ce que
je leur raconte, mais à ce moment là, surgi de nulle part, est apparu le
clone de Dany Boon, lequel s'interposant entre les quatre philosophes
et moi-même, m'a pris à part pour m'expliquer qu'ils étaient en train
d'interpeller un mec dangereux qui avait tapé sur quelqu'un et
"racontait n'importe quoi". Voilà qui justifie assurément que des
fonctionnaires lui cassent la gueule alors qu'il est menotté et au sol
et insultent quiconque remet en cause l'élégance de leur démarche.
D'autres passants (n'ayant rien à voir avec les keufs) m'expliquent que
je n'ai pas à me mêler de l'affaire - je leur demandais justement leur
avis. J'insiste pour que le mec en civil s'excuse, alors arrive une
bagnole de police. Je suis littéralement déporté sur le trottoir d'en
face par un mec qui fait une tête de plus que moi (ça existe). Je
reviens à la charge. "Votre collègue a frappé un homme à terre et m'a
insulté, je voudrais porter plainte", entonné-je sur un ton badin.
"Monsieur, il faudra aller à l'IGN, et si vous persistez on va vous
faire souffler dans le ballon". OK, les mecs, vous avez gagné. Vous êtes
trop forts. Longue vie à vous.
En attendant, j'écoute Richard
Hell et pas eux. Et puis, quand on publiera leurs adresses, ils feront
moins les malins. Analphabètes. Avortons. Frustrés.
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